La Fable du Dieu qui n'a pas de mains.
Cette Fable a été écrite par Mario Montessori elle introduit l'enfant, à travers des images fortes, à la spiritualité.
On peut se demander quelle place a encore le droit de tenir la spiritualité dans notre société française quand les parents d'une école Montessori se sont révoltés de voir l'enseignante de leurs enfants présenter cette leçon, qui est pourtant une ouverture formidable à un questionnement fondamental de l'enfant :
D'où vient le monde dans lequel je vis ?
Qui est derrière cette Nature éblouissante d'ordre et de beauté ?
Voici le texte :
Dès le commencement les hommes ont connu Dieu.
Ils l'entendaient, même s'ils ne pouvaient pas le voir et ils se demandaient toujours, dans leurs langues différentes, qui il était et où il se trouvait.
- Qui est Dieu? demandaient-ils à leurs savants.
- C'est l'être le plus parfait, leur répondait-on.
- Mais comment est-il fait? A-t-il un corps comme nous...
- Non, il n'a pas de corps. Il n'a pas d'yeux pour voir, ni de mains pour travailler, ni de pieds pour marcher; mais il voit tout et il sait tout, même nos pensées les plus secrètes.
- Et où est-il?
- Il est dans le ciel, sur la terre et en tous lieux.
- Que sait-il faire?
- Tout ce qu'il veut.
- Mais qu'a-t-il fait en réalité?
- Ce qu'il a fait est tout ce qui est arrivé.
Il est le Créateur et le Seigneur qui a fait toutes choses et toutes les choses qu'il a faite obéissent à sa volonté.
Il les protège toutes, en prend soin et maintient toute la création dans le plus parfait ordre et dans la plus merveilleuse harmonie.
Au commencement il y avait Dieu seul. Il était absolument parfait et absolument heureux et il ne lui manquait rien.
Toutefois, de sa divinité, il décida de créer; et toutes choses vinrent, voulues par lui et existèrent: Le ciel et la terre, tout ce qui est visible et tout ce qui est invisible.
L'un après l'autre; il créa la lumière, les étoiles, le firmament et la terre avec les plantes et les animaux. En dernier il créa l'homme. L'homme, comme les animaux, était d'une petite parcelle de terre; mais Dieu le rendit différent des animaux et semblable à lui, car l'homme aurait dû être immortel.
Nombreux pensèrent que c'était seulement une fable. Comment un être sans mains et sans yeux peut-il faire quelque chose?
Si Dieu est un esprit que l'on ne peut voir; ni toucher, ni entendre, comment peut-il avoir fait les étoiles qui scintillent au-dessus de nous, la mer qui est toujours en mouvement, le soleil, les montagnes et les vents? Comment un esprit peut-il faire les oiseaux et les poissons et les arbres, les fleurs et le parfum qu'elles répandent alentour? Peut-être pourrait-il créer les êtres, mais dans un monde visible....?
- Cela va bien - pensèrent-ils - de dire que Dieu est partout, mais qui l'a jamais vu? Comment pouvons-nous être certains qu'il est en quelque lieu? On dit qu'il est le seigneur auquel tous et toutes choses obéissent, mais pourquoi devrions-nous le croire?
Et vraiment, cela parait impossible. Nous qui avons des mains, nous ne pouvons faire ces choses et comment pourrait le faire celui qui n'en a pas? Imaginer, ensuite, faire les animaux, les plantes, les roches qui obéissent à Dieu! Si les animaux ne comprennent pas lorsque nous leur parlons, est-il possible qu'ils obéissent? ou les vents, les flots, les montagnes? On peut hurler ou faire du vacarme à quelques pas d'eux ils n'entendent pas, car ils ne sont même pas vivants, et certainement ils n'obéiraient pas.
C'est ainsi que cela nous semble.
Mais vous verrez comment toute chose existante, vivante ou non, en tout ce qu'elle fait et pour le seul fait d'exister, obéit réellement à la volonté de Dieu.
Les créatures de Dieu ne savent pas qu'elles obéissent. Celles qui sont inanimées continuent à exister; celles qui vivent, bougent et continuent à vivre. Et pourtant, chaque fois qu'un vent frais nous caresse les joues, sa voix - si nous pouvions l'entendre - dit: seigneur, j'obéis.
Lorsque le soleil se lève le matin et teinte la mer par ses rayons de lumière, les eaux, le soleil et ses rayons murmurent aussi: seigneur, nous obéissons. Et lorsque l'on voit les oiseaux voler ou les fruits tomber d'un arbre, ou un papillon voltiger sur une fleur, les oiseaux et leurs vols, le papillon, la fleur et son parfum, l'arbre et ses fruits et leur tombée vers le sol, répètent tous les mêmes paroles: - Nous écoutons seigneur, et nous obéissons -.
Au commencement, il y avait le chaos et les ténèbres avaient l'aspect du néant. Dieu dit: - Que la lumière soit! et la lumière fut. Auparavant, il y avait seulement le néant, une immensité sans commencement et sans fin, sombre et froide indescriptiblement. Qui peut imaginer cette immensité, cette obscurité, ce froid?
Lorsque nous pensons à l'obscurité, nous pensons à la nuit: mais notre nuit semblerait un jour éclatant en comparaison à cette obscurité. Lorsque nous pensons au froid, il nous vient l'idée de la glace: mais la glace est une ardente chaleur comparée au gel de l'espace, l'espace qui sépare les étoiles. On pourrait dire la chaleur d'un ardent fourneau. En ce vide démesuré de froid et d'obscurité fut créée la lumière.
Cela apparut comme un vaste nuage de feu qui contenait toutes les étoiles se trouvant dans le ciel: l'univers entier se trouvait en ce nuage et entre les étoiles plus petites était notre monde. Mais alors il n'y avait pas d'étoiles, car il n'y avait que lumière et chaleur. La chaleur était si intense que toutes les matières que nous connaissons - fer - or - terre - roches - eau - étaient des gaz, inconsistants comme l'air. Toutes ces matières, ces substances qui composent la terre ou les étoiles, étaient fondues ensemble en une immense, flamboyante intensité de lumière et de chaleur - d'une chaleur qui ferait ressembler notre soleil actuel, à un morceau de glace.
Ce nuage ardent fait de rien, si monstrueux que l'on ne peut l'imaginer, se mouvait dans l'immensité de l'espace glacial qui n'était rien également, mais infiniment plus vaste. La masse en feu n'était pas plus grande qu'une goutte d'eau dans un océan d'espace: mais cette goutte contenait la terre et toutes les étoiles, qui en vérité sont des millions de fois plus grandes que la terre.
Ce nuage de chaleur et de lumière, en se déplaçant dans l'espace vide, laissait tomber des petites gouttes. Si nous laissons tomber de l'eau en dehors d'un verre, une partie en tombant, demeure unie, le reste s'éparpille en gouttes séparées. Les innombrables bataillons d'étoiles sont comme ces gouttes. Seulement, au lieu de tomber elles se déplacent en tournant dans l'espace, de façon telle qu'elles ne se rencontrent jamais. Elles sont distantes l'une de l'autre de millions de kilomètres.
Quelques étoiles sont si éloignées de nous qu'il se passe des millions d'années avant que leur lumière nous rejoigne, et il faut penser que la lumière parcourt 300.000 km à la seconde.
Les étoiles semblent libres dans leur tourbillon vertigineux à travers l'espace, sans aucun freins, mais elles sont toutes liées dans leur marche par un fil invisible qui est la volonté de Dieu.
Deux de ces gouttes furent notre monde et le soleil, qui accomplissent leur cours à travers l'espace. La terre tourne autour du soleil, mais elle se déplace comme une balle qui roule, sans cesse, sur elle-même et à une vitesse constante.
Lorsque Dieu demanda aux étoiles d'exister, il n'y avait rien qu'il n'eut prévu. Tout fragment de l'Univers, toute parcelle plus petite et négligeable fut obligée de se comporter selon les règles qu'il avait établies.
Quant aux gouttes du nuage lumineux qui devinrent notre monde, il décida qu'il n'y aurait plus de chaos. A la place d'une ardente confusion de gaz, il devait y avoir l'air, l'eau et les roches.
L'ordre de Dieu fut merveilleusement simple. La masse incandescente de la terre était faite d'infinitésimales particules qui se transformèrent en roches, eau et air. Ces particules, microscopiques et pétries ensemble, tournaient à une vitesse fantastique. Et à mesure qu'elles se refroidissaient, elles se déplaçaient toujours plus lentement, se serraient les unes aux autres et occupaient un espace plus réduit.
C'est cette loi divine qui nous a donné ce que nous appelons les trois états de la matière: toutes choses que nous connaissons est gaz, liquide ou solide, et change d'état selon qu'il fait chaud ou froid.
Alors, pourrons-nous dire, pourquoi il y a-t-il tant et tant de millions de choses différentes?
Parce qu'il y a de nombreux types différents de particules chacune avec des instructions différentes: chacune acquiert une sympathie particulière pour certaines particules et une antipathie particulière pour d'autres. Exactement comme les êtres humains; qui sont attirés par certains individus et qui refusent d'être en relations avec d'autres. C'est ainsi que s'organisent divers groupes.
A l'état solide, Dieu a fait les particules si étroitement liées qu'il est désormais impossible de les séparer. Elles forment un corps qui ne change pas de forme à moins qu'il ne survienne une force.
Si un morceau est détaché - si, par exemple, vous commencez à fendre une pierre - les particules adhèrent encore, la pierre et les éclats demeurent des morceaux de roche solide.
Lorsque ce fut le tour des liquides, Dieu dit aux particules: Vous serez unies tant que vous serez dans un récipient et vous prendrez la forme de ce récipient. En dehors de là vous courrez et vous vous répandrez, vous glissant dans les trous et crevasses que vous trouverez sur votre chemin. Vous n'adhérerez pas aussi étroitement que les particules des solides, mais vous pourrez vous déplacer et rouler l'une sur l'autre. Vous pourrez aller devant, derrière et en bas, mais non en haut (et voilà pourquoi nous pouvons mettre les mains dans l'eau et ne pouvons les plonger dans la roche). Et parce que vous n'adhérerez pas aussi étroitement, vous occuperez plus d'espace que les particules des solides.
Et aux gaz Dieu dit: - Vos particules n'adhéreront pas tout à fait. - Et celles-ci peuvent se déplacer librement dans tous les sens.
C'est sur ce plan très simple que Dieu organisa les particules, et c'est ainsi que furent formés les solides, les liquides et les gaz. Mais il ajouta certaines conditions: A moins que la température ne soit très, très chaude, plus chaude que le soleil, ou très, très froide comme le froid de l'espace au dehors, vous ne serez gaz, liquides ou solides tous dans le même temps, mais à un certain degré de chaleur quelques uns de vous seront solides, d'autres liquides, d'autres gazeux.
Et si la chaleur augmente, les solides deviendront gaz mais tous les solides ne se transformeront pas en liquides à la même température.
Et il donna une autre loi: - chacun de vous aura un poids, mais vos poids ne seront pas égaux. Et ceux de vous qui seront plus lourds attireront ceux qui seront plus légers.
Ce furent les lois données par Dieu.
Et obéissant à ces lois la petite goutte de néant qui a formé la terre continua à tourner autour du soleil. La terre; le soleil et les étoiles étaient des boules de gaz - gaz qui contenait tous les éléments dont est fait notre monde; la terre. - Et ils parcoururent leur chemin dans l'espace si froid que la glace est très chaude en comparaison.
Si nous mettons une main dans l'eau glacée, elle devient froide. Pour cette même raison, tandis que le temps passait, les étoiles, le soleil et la terre se refroidissaient et les sphères plus petites se refroidissaient avant les plus grandes. La terre qui est petite en comparaison du soleil est devenue complètement froide à l'extérieur; tandis que le soleil brille encore dans le ciel.
Quand les gaz de la terre se refroidirent, ils obéirent aux lois que Dieu leur avait donné; un après l'autre, à la température établie, ils devinrent d'abord liquides et ensuite solides, et en devenant liquides ou solides leurs particules s'unirent à d'autres particules par lesquelles elles furent attirées et formèrent les substances composées et les substances plus lourdes attirèrent les plus légères.
Si l'on jette une pierre dans un étang, elle va au fond; ainsi les substances fluides plus lourdes s'enfoncèrent vers le centre de la terre et les plus légères surnagèrent dessus comme l'huile surnage sur l'eau.
Ainsi elles s'arrangèrent en couches selon leur poids, mais toutes étaient attirées par le centre de la terre et encore aujourd'hui toute couche se presse sur celle inférieure. Ainsi cela continua et tandis que chaque groupe d'élément obéissait aux lois particulières qui lui avaient été données par Dieu, la terre qui était un ensemble de substances obéissait elle aussi à ses lois, et continuait à accomplir son tour autour du soleil.
Tandis que les gaz, autour, se refroidissaient imperceptiblement, le liquide bouillant aussi commençait à se refroidir et à devenir dense comme une pâte. Le liquide, au centre, était encore très chaud, mais il était poussé dans toutes les directions par le poids énorme qui lui pesait dessus, une couche sur l'autre. Il n'était certes pas assez froid pour se transformer en solide, mais la pression du haut était si forte qu'il commença à se solidifier également.
Quelques unes des couches supérieures étaient demi solides, d'autres encore liquides et toutes se poussaient l'une contre l'autre avec toute leur force. Quelquefois une masse qui était poussée des deux côtés se trouvait compressée entre celles voisines et glissait en haut, alors toute la couche se courbait et c'est ainsi que se formèrent des trous qui immédiatement se remplirent de liquide. Et sur ceux-ci s'étendait une immense mer de gaz enflammé.
Pouvez-vous imaginer cette danse des éléments?
Selon la loi de Dieu, tandis qu'ils se refroidissaient ils devenaient toujours plus petits et toujours plus lourds. Ainsi lorsqu'ils se soulevaient jusqu'à trouver le froid absolu de l'espace externe, ils se contractaient et retombaient dans le feu ardent qu'ils avaient laissé.
Là ils redevenaient chauds et légers, suffisamment légers pour remonter, portant avec eux un peu de la chaleur interne, hors de l'espace, et lorsqu'ils retournaient dans la terre, ils apportaient là un peu du froid extérieur, jusqu'au cur du feu.
Ainsi se déroulait cette danse sans fin et ainsi cela se déroule-t-elle encore aujourd'hui dans le soleil.
La chaleur que le soleil nous envoie à travers des millions de kilomètres est une chaleur que l'on ne peut retenir, les particules de la superficie du soleil, comme celles de la terre quand elle était aussi une masse enflammée, font le double travail d'apporter à l'extérieur la chaleur et d'introduire le froid.
Comme tout cela est merveilleux et comme est simple la loi faite par Dieu!
Lorsque quelque chose se réchauffe elle se répand, et en se répandant devient plus légère et va vers le haut comme une bulle d'air dans l'eau. Mais si quelque chose se refroidit, elle se contracte et tombe vers le bas comme un grain de sable au fond d'une citerne.
En vertu de cette loi, la terre s'est transformée peu à peu de boule de feu en ce que nous connaissons.
A ces lois obéirent les petites particules rayonnantes, dansant leur danse joyeuse; particules trop menues pour être vues et même imaginées, mais, si nombreuses, qu'elles ont constitué le monde.
Pendant des centaines, milliers, millions d'années la danse continua. Et au fur et à mesure les gaz devenaient liquides et au fur et à mesure les liquides devenaient solides, et au fur et à mesure le froid continuait ses assauts depuis l'espace extérieur, ainsi la terre se contracta et devint rugueuse comme une pomme demeurée dans un buffet. Les rides sont les montagnes et les affaissements entre l'une et l'autre sont les océans, et sur ceux-ci se trouve l'air que nous respirons.
Roches, eau, air - solides, liquides, gaz - toute chose correspond à son degré de température.
Aujourd'hui comme hier, et il y a un million d'années, les lois de Dieu sont obéies de la même façon. Le monde roule sur lui-même et tourne autour du soleil.
Et aujourd'hui, comme il y a un million d'années, la terre et tous ses éléments et ses composés, dans l'accomplissement de leur travail, murmurent d'une seule voix:
Seigneur, que ta volonté soit faite, nous t'obéissons.
Vous trouverez ce texte sur le site Monteaco, qui est maintenant accessible sur :
http://web.archive.org/web/20050308082047/www.moteaco.com/albums/franc1.html
1 comment:
Bonjour,
Merci pour ce texte magnifique !
Une petite faute de frappe à corriger si vous voulez bien : "jusqu'au cur du feu".
Merci encore !
N.
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